Retraités : en Allemagne 50% touchent moins de 700 euros

Retraites : en Allemagne 50% touchent moins de 700 euros

 

« Vous savez, je n’ai pas de loisirs. Si je travaille encore, c’est pour payer mon assurance maladie privée », explique Werner Neumann, gardien de parking à Berlin qui, comme un million de retraités Allemands, travaille pour arrondir ses fins de mois. Cet homme de 74 ans, à l’aspect encore solide, malgré sa barbe et ses cheveux courts tous blancs, a pris sa retraite il y a onze ans, après une carrière d’artisan indépendant. La moitié de sa retraite de « quelques centaines d’euros » –il préfère ne pas préciser– passe dans une couverture maladie privée. Il enchaîne depuis 2002 les « minijobs », des contrats précaires, dont les revenus sont plafonnés à 450 euros par mois et dispensés le plus souvent de charges sociales. Depuis cinq ans, il place les voitures dans un parking non loin de la Potsdamer Platz, au coeur de la capitale allemande, et encaisse les deux euros de l’heure dont doivent s’acquitter les automobilistes. Pour 24 heures de travail hebdomadaires, réparties sur deux jours dans la semaine, il touche 400 euros net, soit un peu moins de 4 euros de l’heure. « Cela me permet aussi de m’occuper. Je travaille volontiers, j’aime bien l’idée d’avoir encore des choses à faire deux jours par semaine », précise-t-il. Werner Neumann est tout sauf une exception. Selon des chiffres récents, plus d’un million d’Allemands retraités travaillent encore, ce qui représente 5% des 20 millions de retraités dans le pays. Leur nombre a grimpé de 30% depuis 2003. Quelque 800.000 d’entre eux occupent un minijob, auxquels s’ajoutent 170.000 personnes travaillant avec des contrats plus classiques – dont la moitié à temps plein. Et encore, les statistiques officielles ne comptabilisent pas tous ceux qui travaillent à leur compte. En ajoutant les 430.000 retraités qui touchent une aide sociale pour atteindre le minimum vieillesse, on a la mesure du nombre de personnes qui ne vivent pas de leur retraite.Ceux qui travaillent ne le font cependant pas pour des raisons uniquement financières. L’espérance de vie s’allongeant, un bon nombre de séniors aiment rester actifs, comme Hans-Jürgen Heintze, masseur dans le nord de Berlin. A 67 ans, il aurait pu profiter de sa retraite depuis deux ans. Avec 700 euros par mois du régime général, plus ses économies, il avait de quoi vivre, assure-t-il. « Mais je voulais garder un certain train de vie. J’aime voyager, et j’ai préféré garder mon cabinet et mes loisirs », explique-t-il. « Je soigne certains de mes patients depuis des années, le contact avec eux m’aurait manqué ». Il se voit continuer jusqu’à 70 ans, voire plus, « tant que la santé suivra ». Néanmoins, les réformes successives en Allemagne, qui ont retardé l’âge de la retraite, le portant bientôt à 67 ans, ont eu un impact négatif sensible sur le niveau de vie des retraités. La caisse des retraites allemande a indiqué la semaine dernière que 48% d’entre eux touchaient moins de 700 euros, une proportion qui monte à 53% chez ceux qui l’ont prise l’année passée. Le phénomène touche avant tout les femmes de l’ex-Allemagne de l’ouest (73%), dans une société où l’épouse ne travaille pas ou alors le plus souvent à temps partiel. Ce niveau de revenus peut vite s’avérer insuffisant, notamment dans la mesure où seuls 44% des Allemands sont propriétaires de leur logement, contre 57% en France et 62% en moyenne dans l’Union européenne. Et le pire est sans doute à venir. Avec 6 millions d’actifs employés dans des minijobs et qui ne cotisent donc pas pour une retraite, et 3 millions de personnes qui ne cotisent pas à une retraite complémentaire faute de moyens, le quotidien populaire Bild estimait la semaine dernière que l’Allemagne était sous la menace d’un « tsunami » de pauvreté chez les seniors.

 

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