Transparence patrimoine des politiques : un projet de loi bidon
Initialement, le président François Hollande avait souhaité, comme pour les ministres, rendre public le patrimoine des parlementaires. Las. Le président de l’Assemblée, Claude Bartolone (PS), est immédiatement parti en croisade contre le « voyeurisme » et « la démocratie paparazzi ». Il faut dire qu’il a peu goûté la parution de la photo de sa belle maison dans le Canard Enchaîné. Certains jeunes députés ont pourtant publié leur patrimoine dans la presse locale. Mais une majorité du groupe PS étaient très défavorable à la publication. »Songez à un enfant montré du doigt dans la cour d’école lorsque dans toutes les boîtes aux lettres du village sont distribués des tracts non signés accusant son père dont l’absence ou la fatigue le font souffrir, de tricher, de s’enrichir sur le dos des autres, d’habiter une belle maison ou de partir en vacances grâce à l’argent public », expliquait le rapporteur du Budget et député de Meurthe-et-Moselle, Christian Eckert (PS). Les déclarations de patrimoine seront consultables en préfecture mais ne seront pas publiques sous peine de sanctions pénales (un an de prison et 45.000 euros d’amende). A droite, on critique cette solution « mi-chèvre mi-chou » selon les mots de Bruno Le Maire (UMP) et un choix « hypocrite ». D’autant que beaucoup craignent que ces déclarations se retrouvent sur internet. « Une idée bidon » juge même Jean-Christophe Lagarde (UDI) qui, au passage, voudrait voir l’obligation de déclaration de patrimoine étendue à tout candidat à une élection. Protection des « lanceurs d’alerte » Les députés écologistes, qui plaident depuis des années pour plus de « transparence », sont eux déconfits de voir que finalement les déclarations ne seraient pas publiées. En revanche, ils sont satisfaits de voir instaurer des mesures destinées à mettre un frein aux micro-partis. Les députés PS et le gouvernement mettent en avant les progrès apportés par le texte en matière de contrôle des patrimoine et surtout de lutte contre les conflits d’intérêts. « Réforme exemplaire » vante la fiche argumentaire du groupe PS. Le contrôle sera assuré par la future « Haute Autorité de transparence de la vie publique » qui sera une autorité administrative indépendante (AAA). « On lui a donné tous les moyens possibles d’enquête », assure le président de la commission des Lois, Jean-Jacques Urvoas (PS). Notamment de faire appel aux services fiscaux. Il « conteste » que ce texte soit un « recul », représentant au contraire « des progressions par rapport à l’état du droit ». « Un texte qui fera date », pour René Dosière (PS), spécialiste de ces questions. Déclarations d’intérêts et déclarations de revenus d’activité des parlementaires seront publiques. Près de 7.000 personnes sont concernées par les déclarations d’intérêts (ministres, collaborateurs de cabinets ministériels et des présidents des Assemblées, parlementaires, hauts-fonctionnaires …). Quant à l’interdiction d’exercice de certaines professions, les députés ont décidé d’interdire de commencer une activité au cours du mandat et d’interdire la fonction de conseil sauf pour les avocats alors que précisément les avocats d’affaires étaient dans la ligne de mire. Ces revenus d’activité ne seront pas limités, contrairement à ce qui avait été un temps envisagé. Un débat ne manquera pas non plus de surgir sur l’indemnité pour frais de mandat (IRFM) puisque un amendement signé notamment par Lionnel Luca (UMP) et Charles de Courson (UDI) prévoit la justification et le contrôle des frais par les services de l’Assemblée. Par ailleurs, pour les infractions de corruption, trafic d’affluence, fraude électorale ou fiscale, les députés ont décidé d’instaurer une peine complémentaire d’inéligibilité de 10 ans, contre une inéligibilité à vie voulue par François Hollande et que le gouvernement défendra en séance. Des mesures sur la fraude fiscale, aggravant les peines et protégeant ceux qu’on appellent désormais « les lanceurs d’alerte », ainsi que l’installation d’un procureur financier à compétence nationale sont aussi au programme de la semaine de débats.
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