L’hypermarché menacé, trop grand, trop froid
Trop grand, trop froid, trop inhumain: après avoir été longtemps le chouchou de la ménagère, l’hypermarché est, 50 ans après sa création, décrié par l’opinion, même s’il conserve plus de la moitié des parts de marché et dispose encore de sérieux atouts, selon plusieurs experts. Le premier hyper est né le 15 juin 1963 en région parisienne. Le concept est simple – réunir sous un même toit l’ensemble des produits de consommation courante à des prix abordables, avec un parking adjacent – et remporte assez vite l’adhésion des consommateurs. Les ouvertures d’hypermarchés -magasins d’une surface supérieure à 2.500 mètres carrés – se succèdent. De 2 en 1966, ils atteignent les 284 en 1975, 790 en 1990, 1.143 en 2000, et près de 1.900 en 2012. La France est aujourd’hui le pays qui compte le plus grand nombre d’hypermarchés par habitant. Plus de neuf Français sur dix (94%) les fréquentent régulièrement, à raison d’environ 40 actes d’achats chaque année, avec un panier moyen de 40 euros, selon l’institut Kantar. Pourtant, après avoir longtemps été considéré comme un symbole de modernité et de praticité, le modèle est de plus en plus critiqué. Selon un sondage Ifop fin 2012, 69% des Français assimilent les courses en grandes surfaces à une « corvée ». »L’hypermarché est aujourd’hui essentiellement perçu comme chronophage et inhumain », notait récemment Gaëlle Le Floch de KantarWorldPanel, lors d’une journée spéciale organisée par LSA. Pour cette raison, le format hyper est de plus en plus concurrencé par les magasins de proximité et le e-commerce. Le drive, modèle hybride qui permet de commander ses courses sur internet pour venir les retirer en magasins, cannibalise ses ventes pour au moins un tiers. Sur le non-alimentaire, les enseignes spécialisées sont aussi venues challenger les hypers sur certains produits (biens culturels ou équipement de la maison), relève également GfK. »la force de l’hyper, c’est le choix » Les difficultés se concentrent surtout sur les gros hypers – plus de 7.500 mètres carrés – qui ont perdu 3 points de parts de marché ces dernières années et plus d’un million de clients, note Mme Le Floch. Mais malgré cela, la part de marché globale des hypermarchés reste supérieure à 50% (52,2% en 2012) et « demeure stable depuis plus de 10 ans », tempèrent les experts. En fait « l’image des hypermarchés n’est pas bonne, mais les clients eux sont toujours là », note Mary Ferry de GfK. L’hyper dispose en effet d’atouts non négligeables, relèvent plusieurs experts du secteur. »On critique la taille de l’hyper, mais dans le commerce, être gros, peut aussi être un atout , car il permet de faire les choses rapidement et à grande échelle », juge François Risson, directeur général de DBA Apparel (Dim). Pour la marque, cela permet d’être plus facilement mise en avant, notamment au niveau des nouveautés. Et pour les clients, « la force de l’hyper, c’est encore et toujours le choix », ajoute Loïc Tassel de Procter et Gamble France. Enfin, en commandant de gros volumes en échange de tarifs attractifs, l’hyper reste également l’une des meilleurs façons de trouver des prix bas, élément essentiel en temps de crise, rappelle Marie Ferry. Cependant, des adaptations aux nouvelles attentes des consommateurs demeurent nécessaires. »Le problème des hypers, c’est que la vie s’en est échappée au profit de la rentabilité », a jugé Georges Plassat, PDG de Carrefour lors de la journée LSA. Pour lui, il faut à la fois remettre du « festif et de l’humain », en plaçant le client « au coeur du magasin » et en intégrant le e-commerce « tranquillement ». L’offre doit être conservée, y compris en non-alimentaire, et il faut « remettre de l’argent » dans la rénovation du parc. Bref, « il faut revenir aux origines de l’hyper », car c’était là que se trouvait sa force, estime M. Plassat qui se déclare « très confiant » quant à l’avenir du format. Un avis que partage 48% des consommateurs français, selon l’Obsoco.
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