Mali : la France au Sahel pour dix ans (Michel Rocard)
Fidèle à son habitude, Michel Rocard a mis les pieds dans le plat. Au Sahel, c’est une « bagarre sur une dizaine d’années » contre le terrorisme qui est engagée. C’était avant que François Hollande rappelle que la France « n’a pas vocation à rester » au Mali au-delà du déploiement de la force africaine, attendu d’ici à dix jours. Dix jours ou dix ans ? L’échelle n’est pas la même. Les accents de Cassandre de l’ancien Premier ministre, qui prévoit déjà pertes humaines et « contreparties effrayantes » sur le sol français, traduisent la crainte inhérente à toute intervention militaire : celui de l’enlisement et de la spirale d’un engagement croissant et prolongé. Le chef de l’Etat en est conscient. Tout comme il sait que le consensus politique, respecté par le FN mais entaillé par les Verts, et qui s’exprimera aujourd’hui au Parlement, ne tiendra que s’il sait conclure l’opération Serval aussi rapidement et nettement qu’il a su la déclencher. Les objectifs de guerre fixés par François Hollande – enrayer la progression des troupes terroristes, sécuriser les institutions maliennes et préparer l’entrée en lice de la force africaine – ne dépendent pas que de l’efficacité des frappes. Si la France est en première ligne sur le plan militaire, elle ne veut pas être isolée sur le plan diplomatique. Pour ce qui dépend de François Hollande, le sans-faute est total. Le chef de l’Etat, qui est intervenu à la demande du Mali et des Etats de la région concernés, a obtenu une résolution du Conseil de sécurité de l’Onu, le soutien politique et logistique de plusieurs pays, à commencer par les Etats-Unis et le Royaume-Uni. A Abu Dhabi, il a reçu l’assurance d’une aide « humanitaire, matérielle, financière et éventuellement militaire » des Emirats arabes. Il a encore obtenu l’autorisation de survol des espaces aériens marocain et algérien. Berlin aussi a bougé. L’image de l’Allemagne avait pâti de son refus de s’associer à l’intervention en Libye contre Kadhafi. Cette fois, Angela Merkel envisage une aide « logistique ou humanitaire ». Reste à l’Union européenne à accélérer la mise en place de des soldats instructeurs afin que, comme le dit Alain Juppé, « cette solidarité morale se manifeste concrètement ». Mais, même aidée par d’autres, c’est la France qui, jusqu’au bout portera cette opération. Et François Hollande, seul, qui sera comptable de son issue.
0 Réponses à “Mali : la France au Sahel pour dix ans (Michel Rocard)”