Nicolas Bouzou « on va va dans le mur avec les programmes électoraux »
Selon Nicolas Bouzou, économiste chez Asteres, les programmes des deux poids lourds des candidats ne sont pas de nature à rassurer les marchés financiers. Il estime que toute augmentation brutale des dépenses sera très rapidement sanctionnée par les investisseurs. ( interview de la Tribune)
La zone euro va-t-elle à nouveau être victime de la défiance des marchés financiers ?
Cette défiance est déjà perceptible vis-à-vis de certains pays fragiles. C’est le cas de l’Italie mais surtout de l’Espagne, en témoigne la récente et brutale augmentation des spread entre les taux espagnol et allemand à 10 ans.
Toujours placée sous surveillance négative de la part des trois plus grosses agences internationales de notation, la France est-elle également menacée ?
Au regard des programmes économiques et fiscaux des deux principaux candidats, pourquoi ne le serait-elle pas ? Le coût de la remise en cause de la récente réforme des retraites proposée par François Hollande est estimé à 5 milliards d’euros. Certes, c’est une goutte d’eau par rapport à l’endettement global de la France. Mais si l’on ajoute à cette mesure la revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire, les créations massive de postes dans l’Education nationale, entre autres dépenses immédiates, la facture est très salée. La France va dans le mur.
Mais ces propositions ne sont-elles pas financées ?
Certes, mais il y aura un important décalage de trésorerie. Entre le moment où les dépenses seront engagées, a priori dès juin, c’est-à-dire hors loi de finances, et l’augmentation attendues des recettes fiscales dues à l’augmentation programmée de certains impôts touchant les plus aisés, la France continuera de vivre à crédit.
Le programme de Nicolas Sarkozy est-il plus à même de rassurer les marchés ?
Pas vraiment. Compte tenu également de ce décalage de trésorerie, nous n’irons pas dans le mur dans six mois mais dans huit !
Les marchés financiers ne sont-ils pas capables d’intégrer la dimension politique de toutes les propositions récemment annoncées, en clair, qu’elles ne mettent pas en péril le retour programmé de l’équilibre des finances publiques ?
Absolument pas, et ce pour deux raisons. Pour certains acteurs du marché, la problématique française est une poule aux œufs d’or. Le lancement à la Bourse de Francfort d’un contrat à terme sur les obligations d’Etat françaises à dix ans n’est de ce point de vue pas anodin. Par ailleurs, il faut rappeler que 70% de la dette française est détenue par des non-résidents, des fonds d’investissements anglo-saxons et asiatiques qui n’ont pas du tout la même culture que nous. Pour ces investisseurs, le moindre coup de canif au contrat passé entre la France et les marchés est une aberration.
Résultat ?
Si les marchés financiers se crispent, je crains que le prochain projet de loi de finances soit des plus austères. Avec les conséquences sociales que l’on peut
Quelques lueurs d’espoir ?
La France n’est pas dans la même situation que l’Italie et l’Espagne. Sa consommation reste solide, ses créations d’entreprises sont dynamiques et un très grand nombre de secteurs affichent de jolies performances à l’international. Je pense par exemple à l’aéronautique, la pharmacie, la cosmétique..
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