Les comptes suisses de Bettencourt visés par la justice
Selon un document que Mathieu Delahousse a pu consulter pour RTL, c’est un système très sophistiqué qui avait été mis en place. Les juges d’instruction de Bordeaux doivent mener des vérifications « à très brève échéance », indique la chambre de l’instruction, qui a décidé vendredi dernier de maintenir Patrice de Maistre en détention. L’enquête établit que le gestionnaire de fortune de la milliardaire a lui-même reçu les fonds versés en 2009. Les autres, en 2007 et 2008, ont été remis « en mains propre » à l’héritière de L’Oréal. Les juges détricotent le système des comptes suisses de l’héritière de L’Oréal et des retraits de liquide suspects Les dernières investigations dans l’affaire Bettencourt ont permis à la justice de dévoiler dans le détail le système de transfert de fonds entre la France et la Suisse entre 2007 et 2009. D’après les informations RTL de Mathieu Delahousse, la chambre de l’instruction, qui a décidé vendredi dernier de maintenir Patrice de Maistre en détention, estime que « les juges d’instruction vont devoir désormais effectuer à très brève échéance (…) les auditions de témoins, les confrontations entre tel ou tel protagoniste du dossier ou les recherches à diligenter sur le territoire national ou à l’étranger, concernant la destination prise par telle ou telle somme utilisée dans le cadre du système COFINOR ». COFINOR est le nom de la société de Genève qui a permis de retirer 4 millions d’euros sur des comptes des Bettencourt à la banque suisse Hyposwiss pour les mettre à disposition, en liquide en France. Les magistrats soulignent que ces « sommes considérables (ont été) détournées, obtenues frauduleusement, voire transférées de Suisse en France à partir d’un système opaque et sophistiqué de compensation » qui a fonctionné entre 2007 et 2009.
Grâce à ce Meccano financier, les sommes sont mises à disposition par un établissement français. Un coursier amène ensuite les fonds à son destinataire. Une petite fiche est même rédigée avec le jour, l’heure, la somme, et la personne à laquelle elles ont été remises. Un tableau a été versé au dossier. Il précise que Liliane Bettencourt s’est vue remettre à son domicile des fonds à quatre reprises : le 5 février 2007, le 26 avril 2007, le 2 février 2008 et le 8 décembre 2008. Cela correspond à un total de 2,8 millions. Pour trois autres remises de fonds (1,2 million au total) Patrice de Maistre se fait remettre directement les fonds au siège de sa société. Ces trois versements, à chaque fois de 400.000 euros, interviennent le 18 novembre 2009, le 27 novembre 2009 et le 7 décembre 2009. Ces trois dernières remises de fonds correspondent précisément au prix d’un bateau que le gestionnaire de fortune entendait acquérir à cette période. Mais Patrice de Maistre, interrogé par les juges, assure avoir renoncé à cet achat, estimant qu’il n’était pas « convenable ». Il assure avoir remis cette somme de 1,2 million à Liliane Bettencourt. Lors de son audition le 22 mars 2012, juste avant son placement en détention, Patrice de Maistre déclare ignorer l’usage que Liliane Bettencourt avait fait de cet argent. Les magistrats de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bordeaux, dans leur décision de maintenir en détention Patrice de Maistre, ne font pas mention dans leur arrêt d’un éventuel financement politique. Par ailleurs, aucun élément ne montre que le système a pu exister avant l’année 2007. Ils soulignent en revanche que dès le mois d’octobre 2010, l’avocat suisse des Bettencourt, René Merkt avait détaillé ce système : « Il est arrivé que Patrice de Maistre me demande de mettre à la disposition de Liliane Bettencourt des fonds à Paris, par compensation », avait-il dit aux policiers agissant dans le cadre de l’enquête menée à Nanterre. « Patrice de Maistre insistait pour une remise en main propre de Liliane Bettencourt », ajoutait-il. René Merkt, toujours avocat à Genève, pourrait faire partie des personnes prochainement confrontées à Patrice de Maistre. Patrice de Maistre est mis en examen pour abus de faiblesse et abus de biens sociaux. La partie civile évoque un préjudice proche de 18 millions d’euros au total. Concernant le blanchiment de fraude fiscale, l’ancien gestionnaire de fortune de Madame Bettencourt a « admis les faits », les qualifiant de « grosse erreur ».
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