Accident Total – Greenpeace : une marée noire possible
Selon un scientifique envoyé par Greenpeace à bord d’un de ses bateaux, le «Koenigin Juliana», à proximité de la plate-forme d’Elgin, théâtre d’une importante fuite de gaz, il y aurait «beaucoup de pétrole» sur la mer dans la zone. Total, accusé de manquer de transparence, a organisé une nouvelle conférence téléphonique lundi après-midi avec des analystes financiers pour faire un point de la situation. La compagnie a évalué le coût des mesures prises pour endiguer la fuite. Elles lui coûtent «environ 1 million de dollars par jour», a indiqué Patrick de la Chevardière, le directeur financier du groupe pétrolier français. Une somme à laquelle s’ajoute la perte sur le revenu net opérationnel, soit 1,5 million de dollars quotidien. Greenpeace a effectué les premiers prélèvements pour mesurer l’impact de la fuite sur l’environnement. Son bateau devrait rester sur place jusqu’en fin d’après-midi. «Nous sommes au milieu d’une nappe irisée huileuse. Il y a une grande quantité de pétrole sur l’eau. Il y en a partout. Cela fait plusieurs kilomètres de long et je dirais, plusieurs centaines de large», a assuré Christian Bussau, joint par l’AFP au téléphone. «C’est vraiment un grave accident. Total doit immédiatement commencer à boucher la fuite ou la pollution ne s’arrêtera pas», a-t-il ajouté. L’organisation écologiste a transmis des prélèvements d’eau et d’air à un laboratoire pour déterminer «ce qu’était cette irisation», a-t-il précisé. Le bateau de Greenpeace, un navire de 50 m avec à son bord une trentaine de personnes et une douzaine de journalistes, dont un photographe, est arrivé lundi matin sur le site. Il se trouve à la limite de la zone d’exclusion de 3,7 km instaurée en raison des risques d’explosion autour de la plate-forme. Celle-ci est située à 240 km des côtes écossaises. Total a pour sa part démenti la présence de pétrole. «Il s’agit de condensat de gaz, un condensat léger qui ne pose pas de risque significatif pour les oiseaux marins ou le reste de la vie sauvage», a déclaré une porte-parole de la compagnie pétrolière. Juste après la découverte de la fuite, il y a huit jours, Total indiquait que, lorsque celle-ci s’était produite, du liquide s’était échappé, entraînant la formation d’une nappe fine d’hydrocarbures d’environ 12 km2. Mais ce condensat est censé, selon la compagnie, s’évaporer. Si le site laisse toujours échapper environ 200 000 m³ de gaz par jour, Total qualifie «l’impact sur l’environnement» de «relativement négligeable». Après l’extinction d’une torchère, qui avait continué à brûler pendant plusieurs jours, rendant la plate-forme inaccessible en raison des risques de déflagration, le groupe se concentre maintenant sur l’intervention nécessaire pour tenter de colmater la fuite. Dans un premier temps, «Total met en place un plan qui permet à une équipe de se rendre en sécurité sur la plate-forme» pour faire un état des lieux, a confirmé la porte-parole. Cette équipe inclura des experts de la société américaine «Wild Well Control», spécialiste des interventions d’urgence sur les puits. Elle a notamment travaillé sur les puits en feu au Koweït pendant la première guerre du Golfe. Total devait rencontrer dans la journée à Aberdeen (cote est de l’Ecosse) des représentants de l’autorité de sûreté britannique, Health and Safety Executive, et lui a soumis son plan d’action et une évaluation des risques. La HSE n’a fourni aucune précision sur l’heure de la rencontre ou ce qu’il fallait en attendre. Son avis est purement consultatif, mais Total a déclaré qu’il attendait son approbation avant d’envoyer une équipe. Pour l’étape suivante, le colmatage de la fuite, deux scénarios sont privilégiés : soit injecter des boues directement dans le puits concerné, option la plus rapide mais qui requiert l’intervention de techniciens sur la plate-forme, soit forer des puits de dérivation pour détourner le gaz, opération très longue (jusqu’à six mois) qui implique de creuser des kilomètres de roches, l’origine de la fuite se trouvant à environ 4.000 m en-dessous du plancher marin. La fuite d’Elgin, de l’aveu même de Total, est le «plus gros incident en mer du Nord» auquel le groupe ait été confronté «depuis au moins dix ans.
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