La « mondialisation déloyale », d’après un rapport officiel
En pleine campagne présidentielle française, où revient en force le débat sur l’Europe qui ne protège pas assez, l’ambassadeur de l’industrie Yvon Jacob publie demain un rapport consacré à la « mondialisation déloyale ». Il a été remis aux ministres Eric Besson (Industrie), Pierre Lellouche (Commerce extérieur) et Jean Leonetti (Affaires européennes). « L’industrie européenne connaît un recul, une dévalorisation qui se manifeste par de nombreux signaux inquiétants, pose d’emblée le rapport. Avec une part d’environ 13 % du PIB pour l’industrie, la France est devenue l’un des pays les moins industrialisés d’Europe. » Pour lutter contre la désindustrialisation, le gouvernement français a poussé le principe de réciprocité en matière de marchés publics avec les pays tiers. Depuis le 21 mars et son adoption par le collège des commissaires européens, il fait l’objet d’un projet de règlement communautaire. Et doit être présenté ce matin en Conseil des ministres par Pierre Lellouche. Le texte actuel, qui donne des possibilités aux autorités européennes de faire pression sur les pays tiers qui n’ouvrent pas leurs marchés publics, n’en est cependant qu’à l’état de projet. Il fait l’objet d’une forte opposition de la part de certains Etats membres, parmi lesquels une source bien informée liste le Royaume-Uni, la Suède, les Pays-Bas et le Danemark. En ajoutant que, concernant l’Allemagne, « les points de vue semblent différer entre le ministère de l’Economie et la chancellerie ». Mettre en place la réciprocité en matière de marchés publics est nécessaire mais ce n’est pas suffisant, avance Yvon Jacob dans son rapport (voir ci-dessous). Il préfère insister sur « les défaillances de la surveillance du marché [qui] permettent l’importation de produits non conformes aux normes européennes qui font subir une concurrence déloyale aux biens fabriqués dans les pays membres de l’Union ». La Chine est principalement visée. « Après avoir été perçue comme une opportunité, la croissance chinoise est considérée comme une menace dans de nombreux pays », indique le rapport. Yvon Jacob va jusqu’à mettre en garde contre l’octroi automatique du statut d’économie de marché à la Chine en 2016 qui aurait, selon lui, « un impact très négatif » car « il priverait dans les faits les membres de l’Union européenne de l’outil instrument de défense commerciale », qui permet aujourd’hui à l’Europe d’appliquer des mesures antidumping en réponse à des pratiques déloyales chinoises. Pour éviter que ne circulent en Europe des produits non conformes aux normes européennes, le rapport en appelle à une surveillance accrue du marché intérieur, jugée aujourd’hui trop faible. Elle pourrait donner lieu à la création d’un office européen de surveillance inspiré de l’office de lutte antifraude (Olaf). Et aboutir, après des discussions dans le cadre du G20, à une révision du rôle de l’Organisation mondiale du commerce qui est, conclut Yvon Jacob, « dans un certain nombre d’impasses ».
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