Réforme du pacte de stabilité : sanctions plus lourdes pour une meilleure intégration budgétaire
L’Union économique a engagé ce jeudi une vaste réforme du Pacte européen de stabilité et de croissance, qui contrôlera de manière plus sévère les déficits, la dette et les déséquilibres budgétaires avec à la clé des sanctions plus lourdes. Ces modifications doivent recevoir l’adhésion du parlement européen. En outre, il est vraisemblable qu’elles seront examinées en octobre à l’occasion de l’approfondissement de l’union économique et budgétaire au sein de la zone euro. En attendant, une vraie unité monétaire et budgétaire, l’Europe resserre les boulons. Ainsi on fixera une limite en matière de dépenses, la hausse des dépenses annuelles ne pourra pas excéder la hausse du PIB à moyen terme. L’objectif est d’affecter des ressources à la réduction de la dette. En cas d’écart avec la limite, des sanctions seront prises. L’objectif d’une dette 60% du PIB, déjà présent dans le Pacte de stabilité et de croissance sera suivi de plus près. En cas de dépassement de ces 60%, y compris si le déficit est en dessous des 3% du PIB fixés par le Pacte, il y aura aussi sanction ; la dette devra être réduite à un rythme annuel de 5% sur trois années Pour la zone euro, un nouveau dispositif de sanction est prévu, des sanctions qui pourront être prise au cours de l’exercice budgétaire en cas de déficit excessif avec application de manière graduelle. Un dépôt financier non rémunéré de 0,2% du PIB pourra être imposé à un Etat membre, suivi d’une amende si des mesures de correction ne sont pas mises en place. Un Etat souhaitant éviter une procédure de déficit excessif proposée par la Commission européenne devra réunir une majorité qualifiée à cet effet (principe de la règle de la majorité inversé). En cas d’infractions répétées, une amende annuelle de 0,1% du PIB, adoptée avec la règle de la majorité inversée, pourrait être décidée. Un tableau de bord des déséquilibres macro-économiques sera également installé avec un mécanisme de détection précoce. Les produits des amendes résultant de l’application de ce nouveau dispositif de contrôle et de sanction seront affectés au Fonds européen de stabilité financière (FESF) ou à son successeur à partir de 2013, le Mécanisme européen de stabilité financière (MES). Ces nouvelles mesures s’inscrivent dans le processus d’intégration budgétaire qui pourrait se concrétiser à terme par la création d’euro-obligations ; cela devrait ainsi ouvrir un vaste chantier de réforme de l’Europe. On connait la position des uns et des autres. Jusque là, les pays du nord et en particulier l’Allemagne était fortement opposés à la mutualisation des dettes, à l’inverse des pays du sud, dont la France. Pour le nord de l’Europe, le risque est d’offrir gratuitement un parapluie obligataire aux pays laxistes sans la contrainte de la rigueur de gestion. Pour les pays du sud, c’est la possibilité d’échapper à la pression du marché sur leurs dettes en continuant de déroger aux objectifs de stabilité budgétaire. Jusque là, on a surtout assisté en Europe à l’affrontement des deux théories économiques dominantes, d’un coté l’orthodoxie à l’allemande avec priorité à l’équilibre budgétaire, de l’autre la fuite en avant des pays latins sollicitant à outrance la dépense budgétaire pour la relance de l’économie. Ces oppositions très vives, exprimées publiquement, ont provoqué un effet désastreux sur les marchés d’autant qu’aucune instance européenne n’était en capacité d’imposer la moindre cohérence. Les mêmes clivages sont réapparus avec force lors de la réunion des ministres des finances de l’euro de vendredi 16 septembre 2011. Il est clair que le temps des marchés ne correspond pas aux temps des responsables politiques ; l’absence évidente et dramatique de gouvernance européenne a donc contraint les gouvernements à programmer une réunion les 17 et 18 octobre pour envisager une plus forte intégration économique et financière. Cette réunion pourrait aussi proposer une nouvelle réforme du traité européen pour le début 2012. Il s’agirait notamment de donner davantage de pouvoirs à l’Eurogroup et de le doter d’un président permanent ; C Herman Van Rompuy, président du conseil européen, est chargé de préparer cette réforme ; l’Eurogroup, placé sous la coupe des ministres des finances, se transformerait en institution officielle et permanente disposant dune superstructure administrative spécifique. Cette nouvelle structure n’est pas du goût de la commission qui aurait préféré que ce soit le commissaire aux affaires économique qui préside ce nouvel Eurogroup. Au-delà des questions de préséance, se posent des problèmes de fond sur la nature et l’intensité de l’intégration économique et financière de l’Europe. Une plus grande discipline budgétaire imposée par l’Eurogroup suppose en effet un abandon de souveraineté des Etats, d’où la nécessité de reformer le traité européen et les institutions internes aux Etats. La perspective des euro-obligations va figurer en bonne place dans l’ordre de cette réunion. Schématiquement, il s’agit d’accepter une mutualisation partielle ou totale des dettes contre la rigueur budgétaire ; C’est-à-dire une vraie intégration monétaire avec son corollaire, l’intégration budgétaire. En clair, c’est un dessaisissement au moins partiel des responsabilités nationales sur les budgets au profit de la nouvelle autorité européenne. Une autorité européenne chargée d’une part dévaluer la crédibilité économique de chaque budget national et de prendre des sanctions en cas de dérives. Ce serait évidemment un pas considérable dans la voie de l’intégration qui va demander une réforme du traité européen. Un aspect juridique qui peut prendre du temps et dont la durée va dépendre aussi du niveau d’intégration. Cette réforme passera aussi par une plus grande intégration fiscale ; actuellement les différences sont notoires entre les membres de l’union économique et les opinions publiques sont actuellement assez hostiles à plus de solidarité et de cohérence au plan européen. Il y a cependant un davantage politique aux transferts de compétences nationales vers l’Europe, les responsables des Etats pourront reporter la responsabilité de la rigueur sur Bruxelles et utiliser ainsi le parapluie européen pour imposer une austérité qu’ils sont incapables d’assumer seuls pour des motifs électoraux. Il y aura vraisemblablement de fortes réactions négatives à l’abandon de souveraineté des Etats mais finalement l’ampleur de la crise peut imposer maintenant ce qui était encore impensables il y a quelques mois, voire quelques semaines. Pour l’immédiat, le ministre allemand des finances, récuse toute nécessité d’un nouveau traité et toute éventualité d’euro-obligations. Cependant les fortes turbulences qui vont recommencer la semaine prochaine pourraient amener les uns et les autres à revoir leurs positions.
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