Conséquences de la sortie de l’euro La sortie de l’euro (ou son éclatement) est posée par de nombreux souverainistes de droite comme de gauche. On ne peut intellectuellement ignorer cette hypothèse et se contenter de dire que ce serait une catastrophe ou au contraire la vraie solution pour sauver la France du désastre. Pour tenter de répondre à ce questionnement, il faut rappeler la réalité de notre situation. Schématiquement, nous accumulons les déficits depuis 35 ans au point aujourd’hui d’avoir à gérer une dette officielle de l’ordre de 2000 milliards soit à peu près l’équivalent du PIB fin 2011(il faudrait prendre en compte les dettes hors bilan, les dépenses non provisionnées etc.). On peut bien sûr simplifier et considérer que nous n’avons pas à répondre de ces dettes. Ce serait alors faire défaut et les conséquences seraient catastrophiques vis-à-vis de notre monnaie et des taux d’intérêt. Supposons que nous sortions brutalement de l’euro pour retrouver par exemple le franc. Immédiatement, la monnaie subirait une dévaluation de l’ordre de 20%. Certains diront que c’est une dévaluation compétitive qui nous permettrait de mieux exporter. Ce raisonnement n’est pas faux mais compte tenu de nos importations contraintes (énergies, biens non produits en France), le renchérissement de ces importations serait au moins de 20%. Donc retour à la case départ. On pourrait objecter que notre industrie notamment pourrait se développer sur les biens actuellement importés. Sans doute mais on ne reconstruit pas un appareil industriel en une ou deux années. Il faut tenir compte des investissements à réaliser et de la productivité à dégager pour être compétitifs. Si on ne change pas fondamentalement la structure et le niveau de nos dépenses, aucune compétitivité ne pourra être restaurée. La sortie de l’euro provoquerait par ailleurs un mouvement économique autarcique généralisé qui nuirait aux échanges, or les échanges internationaux portent la croissance, ils sont même supérieurs à la progression de l’activité. Le protectionnisme qui en résulterait amènerait inévitablement des mesures de rétorsion de la part des pays où nous exportons (matériel de transport comme les Airbus ou TGV, centrale électriques, BTP, produits pharmaceutiques, industrie chimique etc.). Pour la plupart de ces productions, nous tirons une grande part de compétitivité de la complexification des processus de production qui permettent de profiter des avantages de la spécialisation spatiale. Notre industrie automobile par exemple n’est réellement française qu’à hauteur d’environ 25%. Une automobile entièrement française verrait son prix doubler compte tenu du niveau de nos coûts de production. Il en serait de même pour de nombreux produits. La dévaluation issue de la sortie de l’euro générerait une hausse considérable des taux d’intérêt, or une économie moderne ne peut vivre sans le recours à l’emprunt même s’il faut bien considérer que certains emprunts sont excessifs quand ils ne peuvent être apurés dans des délais satisfaisants. La dévaluation provoquerait une inflation importante certainement supérieure au montant de la dévaluation puisque nos productions seraient en grande partie soumises au niveau de nos coûts. Ou alors il conviendrait parallèlement d’engager un plan d’austérité sans précédant, c’est-à-dire par exemple augmenter les prélèvements obligatoires de 10% et réduire nos dépenses de 10% également. Pour résumer, la sortie de l’euro est possible mais il faut alors avoir le courage de dire que cela se traduira par une baisse drastique du niveau de vie. Pourquoi pas, ce serait une modification fondamentale de notre mode de vie et notamment de notre mode de consommation (ce que souhaitent les écolos purs et durs). Pendant une longue période, celle correspondant au réajustement des modes de production et de consommation, il faudrait alors compter sur une hausse également brutale du chômage ; officiellement le taux de chômage est de l’ordre de 10%, en réalité environ 15% si on compte les personnes aidées – RSA par exemple). Le chômage pourrait alors doubler ; ce serait autant de ressources fiscales en moins, autant de consommation en moins, autant de croissance en moins. L’analyse de l’économie moderne s’accommode mal des raisonnements simplistes car on ne peut faite abstraction des effets systémiques d’un brusque retour en arrière. L’euro au moins le mérite d’apporter un peu de stabilité (notamment dans les échanges). Il n’est pas parfait car il souffre d’une insuffisance de gouvernance économique et politique.de plus. De toute manière, il faudra construire une nouvelle Europe de manière plus progressive afin d’harmoniser les conditions économiques et sociales (Europe des cercles) En outre, l’économie mondiale présente de graves insuffisances en matière de régulation notamment pour harmoniser progressivement la concurrence notamment ses dimensions économiques, monétaires, sociales et environnementales. Il est exact qu’après la crise de 2008, on a vite oublié les promesses en matière de régulation. Ceci étant toutes ces insuffisances ne sauraient donner la moindre légitimité scientifique au discours populiste du repli sur soi. Ajoutons un dernier argument, politique celui-là, à savoir que le repli sur les seuls intérêts nationaux a toujours correspondu dans histoire aux conflits les plus dramatiques. La France a besoin d’Euro et réciproquement pour le progrès comme pour la paix.
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